L’avenir ne sera pas celui d’un métavers détenu par un seul acteur répondant à des règles de contrôle traditionnelles, mais appartiendra plutôt à plusieurs métavers interopérables.
Métavers est devenu le buzzword des journalistes et des investisseurs. Facebook a ouvert la marche et annoncé il y a peu qu’il se rebaptise Meta. L’entreprise affirme dans la foulée que le métavers n’est rien de moins que l’avenir d’internet.
Microsoft, à son tour, a enchaîné avec une annonce similaire lors de sa présentation d’entreprise.
Plus tôt dans l’année, Epic, le créateur du jeu Fortnite, levait un milliard de dollars lors d’un tour de table, illustrant ainsi l’intérêt des investisseurs pour les expériences immersives en ligne.
Si le métavers ou monde virtuel fictif n’est pas forcément lié à la Réalité virtuelle (RV) ou augmentée (RA), il bénéficiera certainement de ces technologies. Avant d’utiliser des casques de réalité virtuelle, nous allons utiliser nos téléphones pour accéder à ces nouveaux mondes en ligne. En réalité, nous baignons déjà massivement dans des métavers depuis le début des années 2000. On pense à des mondes virtuels comme SecondLife, qui compte encore une communauté de 200’000 fans, mais aussi à Minecraft ou à Roblox. Ce dernier réalise aujourd’hui un chiffre d’affaires d’un milliard de dollars et capitalise 70 fois son revenu à la bourse.
Des mondes de plus en plus immersifs
Les métavers ont comme caractéristiques essentielles: la collaboration et la cocréation au sein d’une communauté active et engagée. En règle générale, leur force est proportionnelle à l’intensité de la relation entre les membres de la communauté et ils sont souvent liés à des activités récréatives qui peuvent être monétisées. Mais pourquoi en parler seulement maintenant? Y a-t-il du nouveau dans la manière dont Facebook appréhende le métavers?
Facebook tentera de faire évoluer ses utilisateurs au sein de son propre univers. Les nouvelles technologies de RV et RA, combinées à des dispositifs d’interaction homme-machine de plus en plus sophistiqués, rendront certainement les mondes alternatifs créés plus immersifs encore. Au final, ces espaces resteront des mondes clos et hiérarchisés de manière pyramidale où les Facebook de la planète continueront d’imposer leur volonté.
Vers une hiérarchie décentralisée
Le vrai saut vers le Web 3.0 ne sera toutefois réalisé dans ces espaces virtuels qu’en recourant à une hiérarchie décentralisée où l’ensemble des acteurs possède un même niveau d’information. Là où chacun est à la fois important mais non indispensable. C’est en adoptant des technologies comme la blockchain que le métavers réalisera son plein potentiel basé sur la confiance numérique et l’interopérabilité.
«Il est probable que la tentative de Facebook échouera dans son intention initiale de nous rassembler virtuellement.»
Ainsi des applications blockchain comme les cryptomonnaies et les jetons non fongibles (NFT) faciliteront l’achat et la vente de biens à l’intérieur du métavers, ouvrant ainsi des opportunités commerciales inédites. Plus important encore, ces jetons échangeables permettront à terme de déplacer notre identité et nos actifs numériques entre différents mondes métavers. Par exemple, une épée pixélisée possédée dans Roblox pourra se transformer en un costume rare, une fois déplacée dans Fortnite. Cette même tenue pourrait ensuite être revendue pour se permettre l’accès à un concert virtuel d’une superstar. Cette navigation transparente entre les différentes plateformes est déjà décrite dans des ouvrages de science-fiction tels que «Le samouraï virtuel» et «Ready Player One».
Plusieurs métavers interopérables
Le Web 3.0 sera un web décentralisé et verra des plateformes comme WhatsApp, Signal, TikTok ou Twitch se succéder au rythme des saisons. Malgré un potentiel succès commercial à court terme, il est probable que la tentative de Facebook échouera dans son intention initiale de nous rassembler virtuellement. L’avenir ne sera pas celui d’un métavers détenu par un seul acteur répondant à des règles de contrôle traditionnelles, mais appartiendra plutôt à plusieurs métavers interopérables. La valeur, cocréée par la communauté, sera attribuée à l’individu qui pourra l’utiliser et la monétiser à sa guise, dans le respect de son identité et de celle de ses relations numériques.
- Directeur de la Fongit, fondation genevoise pour l’innovation technologique
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