- Actualité Face à l’urgence climatique, comment continuer de partir en voyage en émettant moins de gaz à effet de serre ? Le groupe de réflexion The Shift Project s’est intéressé à la question. Voici ses pistes de réflexion.
Comment continuer à voyager tout en respectant le climat ? (Photo d’illustration : Rana Sawalha / Unsplash)
Face au réchauffement climatique, la transition vers une société plus respectueuse de l’environnement implique de changer ses habitudes de voyage et de loisirs. Comment continuer à partir en voyage tout en limitant ses émissions de gaz à effet de serre ? Le groupe de réflexion The Shift Project, qui « œuvre en faveur d’une économie libérée de la contrainte carbone », tente de répondre à ces questions dans son rapport « Voyager bas carbone », qui vient d’être publié.
La question de la « mobilité longue distance »
Premier constat, en moyenne, un Français parcourt environ 7 600 kilomètres cumulés pour sa « mobilité longue distance », soit plus de 80 km à vol d’oiseau du domicile ou 100 km de distance routière : 72 % en voiture, 14 % en train, 9 % en avion, 3 % en autocar. Cela comprend les vacances, les loisirs, les visites à des proches ou le travail.
Cela signifie que dans 86 % de ses déplacements de ce type, un Français utilise du pétrole et émet donc des gaz à effet de serre. Deuxième constat, les 9 % de trajets en avion génèrent 42 % des émissions de gaz à effet de serre du secteur des voyages, soit autant que celles des voitures et camions.
Dans son rapport, le groupe de réflexion présidé par Jean-Marc Jancovici explique tenir compte de « la contrainte énergie-climat doit être anticipée tout en préservant au maximum la liberté de voyage, de découverte, de vacances et de contact avec ses proches. » Voilà le décor posé, reste à étudier les solutions.
La voiture électrique émet moins de gaz à effet de serre. (Photo : Emile Kemmel / Ouest-France)
« Nouvelles offres de voyage »
« Décarboner la mobilité, c’est possible, nous explique Nicolas Raillard, coordinateur du rapport de The Shift Project. Cela implique que l’empreinte voyage” de l’ensemble des Français passe de 41 millions de tonnes de CO2 cette année à 8 millions de tonnes en 2050. »
Ainsi, parmi les solutions envisagées, l’association propose de limiter progressivement la mobilité long-courrier en avion, tout en développant des modalités de voyage alternatives. « Nous proposons de développer de nouvelles offres de voyage intercontinentaux qui passent par le train, des offres de séjours attractifs sur plusieurs mois (voyager moins souvent mais en restant plus longtemps sur place), ou des offres touristiques en Europe qui soient attractives pour les populations concernées par les vols intercontinentaux, et qui passent par le train. »
Privilégier le train
À l’intérieur de l’Hexagone, The Shift Project suggère « de privilégier le train afin de limiter l’usage de la voiture, en déployant des services complémentaires en intermodalité avec le train. Ces services permettront de réaliser les derniers kilomètres de voyage et de se déplacer une fois sur le lieu de villégiature. » Ces transformations de la mobilité doivent être accompagnées d’offres touristiques nouvelles.
Il s’agit de conserver l’essence du voyage tout en le décarbonant et en s’accommodant de la contraction énergétique : « Nous proposons de développer le tourisme, en France et en Europe, autour d’offres de transport, d’hébergement et d’activités. »
En résumé, faire en sorte que la voiture prenne une place moins importante qu’aujourd’hui. « Elle devra être électrique, petite, légère, peu puissante et économe. » Et viendra en complément du train. « Elle fera partie d’un bouquet d’offres de mobilité pour les touristes sur leur lieu de villégiature. » En parallèle, l’association propose que l’enseignement de l’écoconduite soit généralisé et que la vitesse sur autoroute soit limitée à 110 km/h.
The Shift Project préconise de développer de nouvelles offres de voyages internationaux en train. (Photo d’illustration : Joël Le Gall / Ouest-France)
« Offrir une alternative convaincante à la voiture et à l’avion »
Concernant les déplacements professionnels, l’association souhaite que les entreprises s’engagent « dans la rationalisation carbone des déplacements de leurs salariés et dans la conversion de leur flotte de voitures de fonction vers des véhicules sobres et électriques. » Par ailleurs, tout comme les particuliers, il convient de s’appuyer sur des infrastructures et des services ferroviaires attractifs. « L’idée est d’offrir une alternative convaincante à la voiture et à l’avion. »
Sur le papier, cela semble cohérent et réalisable. Sur le terrain, est-ce du domaine du possible ? « Certaines de nos mesures peuvent permettre des résultats dès le prochain quinquennat, lâche Jean-Marc Jancovici. Ne parier que sur les propositions technologiques, comme les biocarburants ou la voiture électrique, augmente les risques de ne plus pouvoir voyager dans les décennies à venir. »
Prendre soin de l’environnement et du climat c’est engager un Plan de transformation de l’économie française (PTEF). L’objectif étant de « stabiliser les distances parcourues par les Français. » Cela passe par une place plus importante du train et donc une réduction de l’usage de l’avion et de la voiture. Bien évidemment, cela aura des répercussions sur les emplois, mais la perte d’un « côté devrait être compensée par les gains de l’autre » selon les projections.