En plus de son extrême dangerosité en cas d'accident, et bien que l'Union européenne lui ait officiellement octroyé un label «vert», l'un des principaux inconvénients de l'énergie nucléaire est la production de déchets radioactifs, qui peuvent rester toxiques pendant des centaines de milliers d'années.
Outre les progrès à pas de géant du côté de la fusion nucléaire, il existe une piste ancienne mais sérieuse, à laquelle Arte a consacré un excellent documentaire, pour parer à ce problème: l'utilisation du thorium, un métal légèrement radioactif présent en grande quantité sur Terre.
Les déchets produits par sa fusion sont d'une part moins nombreux, et d'autre part ne restent dangereux que pendant quelques centaines d'années. Cela reste non négligeable, mais représente un progrès certain.
Transmutex, une start-up suisse, compte créer un réacteur effectuant une fission de thorium à l'aide de neutrons provenant d'un accélérateur de particules.
L'utilisation d'un accélérateur permettrait de ne pas dépendre d'une réaction en chaîne, donc de pouvoir couper le flux de neutrons et d'arrêter le réacteur bien plus vite que les dispositifs actuels.
L'écologie au cœur des politiques énergétiques
L'idée n'est pas nouvelle, explique Swissinfo. En 1990, Carlo Rubbia, le directeur de l'Organisation européenne pour la recherche nucléaire (CERN) avait tenté de créer un réacteur d'un nouveau genre, en couplant aussi un réacteur au thorium à un accélérateur de particules. Seulement, le manque d'intérêt de l'industrie nucléaire, qui à l'époque se souciait peu de ses déchets, avait mis un terme à l'aventure.
Parmi les scientifiques participant à ce projet se trouvait Federico Carminati, l'un des cofondateurs de Transmutex. Maintenant que les problématiques écologiques se trouvent au cœur des politiques énergétiques, l'ingénieur nucléaire pense que l'industrie est mûre pour sa technologie.
En effet, en plus du thorium, Transmutex estime que son réacteur pourra être alimenté par des déchets nucléaires produits aujourd'hui, et ainsi réduire leur période de toxicité. Cerise sur le gâteau, les sous-produits de cette méthode ne peuvent pas être utilisés pour la fabrication d'armes nucléaires.
Selon Swissinfo, la start-up souhaite disposer d'un prototype de démonstration d'ici une dizaine d'années. Attention cependant à ne pas être trop optimiste: comme l'expliquait à L'Union le directeur adjoint de l'Autorité de sûreté nucléaire Julien Collet, tous les projets nucléaires font l'objet d'une attention particulièrement minutieuse avant de pouvoir être mis en application.
Surtout que plus une technologie est différente de celle qui existe déjà, plus elle met de temps à être testée, détaille Julien Collet: «Plus la technologie est innovante, nouvelle, plus elle va nécessiter d'acquérir des connaissances scientifiques, technologiques, nouvelles pour démontrer la sûreté du réacteur.» Ce ne sera donc pas pour tout de suite –mais cela pourrait être quand même.