Un modèle du système de transport impliquant un train Maglev circulant dans un tunnel à faible vide. | The Third Research Institute of China Aerospace Science and Industry Corp
Selon le journal China Daily, des chercheurs ont testé avec succès le fonctionnement d’un train à sustentation magnétique, ou Maglev, sur une distance d’environ deux kilomètres, à l’intérieur d’un tube à vide — un concept dénommé Vactrain. Au cours de l’essai, le train aurait atteint la vitesse de 129 km/h. Selon l’équipe responsable de ce test, il s’agit de la première démonstration réussie d’un train Maglev voyageant à l’intérieur d’un « tube à faible vide ».
L’intérêt des trains à sustentation magnétique réside dans leur absence de résistance au roulement — ces trains n’étant pas en contact avec les rails, mais en lévitation ; ils atteignent ainsi des vitesses beaucoup plus élevées que les trains traditionnels. En avril 2015, un Maglev expérimental japonais a par exemple atteint la vitesse record de 603 km/h ; l’objectif de ce projet est de construire une ligne assurant la liaison Tokyo-Ōsaka (distantes d’environ 500 km) en une heure.
Le train chinois dont il est question ici repose sur une technologie légèrement différente : il s’agit également d’un train de type Maglev, mais celui-ci est destiné à voyager dans des tubes (ou des tunnels) à vide partiel — ce qui élimine la résistance à l’air en plus d’éliminer la résistance au roulement. En théorie, ceci pourrait permettre aux trains de circuler à des vitesses hypersoniques, de l’ordre de 1500 km/h, voire plus, avec relativement peu de puissance. C’est sur cette même technologie que repose le projet Hyperloop, proposé par Elon Musk en 2013.
Un projet longtemps exploré, jamais abouti
Le Vactrain chinois a été testé dans la province de Shanxi, au nord de la Chine, dans un pipeline de deux kilomètres de long ; il aurait atteint la vitesse de 129 km/h. Mais ce ne sont que des tests préliminaires : l’équipe prévoit de construire une piste d’essai grandeur nature de 60 kilomètres, dans le comté de Yanggao, et de faire en sorte que le train atteigne une vitesse de 1000 km/h.
En 2013, Elon Musk avait proposé un concept de train voyageant dans un tube à vide, pour relier la ville de Los Angeles à la baie de San Francisco. Le projet initial, baptisé Hyperloop alpha, consistait en un double tube surélevé, conditionné sous basse pression, dans lequel se déplaceraient des capsules transportant des voyageurs et/ou des marchandises à plus de 1200 km/h. La propulsion de ces « wagons » devait être assurée par un champ magnétique généré par des moteurs à induction linéaires placés à intervalles réguliers le long des tubes.
Le système devait permettre de relier les deux métropoles en moins de 30 minutes. Et surtout, l’investissement estimé à l’époque (10 milliards de dollars) était cinq fois inférieur à celui que nécessitait la construction d’une ligne ferroviaire traditionnelle.
Dès le départ, le PDG de Tesla a tenu à ce que le concept repose sur des bases open source ; il n’avait ainsi déposé aucun brevet. De ce fait, plusieurs sociétés américaines et canadiennes se sont intéressées à cette technologie. Malgré quelques essais plutôt encourageants, aucun système Hyperloop n’a jamais été construit à grande échelle. L’un des projets les plus aboutis, celui de Virgin Hyperloop, a finalement décidé de se consacrer uniquement au transport de frêt. Quelques projets ont été évoqués en France (à Toulouse, Lyon et Limoges), mais ceux-ci semblent aujourd’hui à l’arrêt ou abandonnés.
De nombreux défis à relever avant une exploitation commerciale
Après cette première démonstration réussie d’un train Maglev se déplaçant dans un tube à basse pression, la Chine pourrait donc jeter les bases d’un tout nouveau système de train à grande vitesse, rivalisant avec les avions de ligne.
Plus tôt cette année, Elon Musk est revenu dans l’aventure en annonçant via son compte Twitter que sa société de construction de tunnels de transport urbain, The Boring Company, tentera de construire un Hyperloop fonctionnel « dans les années à venir », soulignant que c’était le moyen le plus rapide de se rendre d’un centre ville à un autre si la distance est inférieure à environ 3200 km. La société Hyperloop Transportation Technologies (HyperloopTT) vise, quant à elle, à ouvrir une ligne entre Venise et Padoue, en Italie, pour les jeux Olympiques d’hiver de 2026 — mais rappelons que c’est cette même société qui avait prévu de construire une piste d’essai à Toulouse, pour finalement abandonner son projet quelques mois plus tard…
Il s’avère que si cette technologie fait rêver, elle s’accompagne de nombreux défis techniques : « celui de la rigidité des tubes installés entre des pylônes à l’air libre ; faire que l’air dans les tubes ne franchisse jamais le mur du son ; comprimer et refroidir l’air aspiré… », explique dans The Conversation Yves Crozet, économiste des transports, professeur émérite à Sciences Po Lyon. Des obstacles réglementaires et politiques, inhérents à la mise en place d’une toute nouvelle et massive infrastructure (composée de tunnels, de piliers et de tubes), sont également à considérer.
À ces difficultés techniques et politiques s’ajoute l’aspect financier : non seulement ce transport nécessite la création d’une infrastructure complète et donc un investissement initial conséquent, mais acheter une place à bord de ces trains ne serait pas accessible à tous, du fait de leur faible débit potentiel, précise l’économiste. Or, « les gains de vitesse physique n’ont pas d’intérêt s’ils ne peuvent être démocratisés », souligne-t-il.