La crise sans précédent du coronavirus et le confinement forcé de plusieurs milliards d'êtres humains à travers la planète ont donné matière à philosopher sur l'avenir de la société. À quoi ressemblera l'humanité dans 10 ou 20 ans ? Les nouvelles technologies, au cœur de la lutte contre la pandémie, vont-elles nous amener à vivre sans interaction humaine, ou va-t-on au contraire revenir à un mode de vie plus simple et durable ?
L'histoire a démontré que l'humain est capable de surmonter de graves crises économiques et sanitaires, et il devrait y parvenir une fois encore avec celle de la COVID-19. Face à son ampleur historique, nous devrons toutefois tirer les conclusions qui s'imposent quant à la difficulté de subir une crise plutôt que de l'anticiper, en préparation des conséquences, imminentes, de la plus grosse crise, celle du dérèglement climatique... En attendant, voici la confrontation de deux visions radicalement différentes de la société de demain. La première est celle d'une société ultra high-tech où les technologies seront omnipotentes et tendront à limiter de plus en plus les interactions humaines. La seconde est celle d'une société dite low-tech, qui prône au contraire un retour aux sources en réduisant drastiquement notre dépendance à la technologie.
Une société futuriste ultra high-tech
D'ici dix à vingt ans, les nouvelles technologies pourraient bien nous permettre de vivre sans aucune interaction humaine. De l'informatique quantique, aux robots, en passant par l'intelligence artificielle, la réalité augmentée ou encore les drones et les voitures autonomes, les machines pourront assister et remplacer les humains dans la plupart de leurs tâches quotidiennes. Que cela soit pour communiquer, travailler, apprendre, se former, se soigner, consommer, ou encore se divertir, la présence humaine ne sera plus indispensable.
Les promesses de l'Informatique quantique
Si l'on en croit les récentes avancées de Google et IBM en la matière, l'ordinateur quantique pourrait bouleverser profondément notre futur d'ici dix à vingt ans. Considéré comme le prochain paradigme de l'informatique, il exploite les lois étonnantes de la mécanique quantique pour traiter les informations et résoudre des problèmes dont la complexité algorithmique est exponentielle et hors de portée des plus puissants supercalculateurs actuels.
Les ordinateurs quantiques ne constituent pas une évolution des systèmes informatiques tels que nous les connaissons, mais des machines d'un nouveau genre tirant parti de phénomènes physiques de la matière à l'échelle de l'atome.
« Avec les progrès fulgurants dans le domaine de l'informatique quantique, le développement des ordinateurs quantiques entre dans une phase qui devrait changer radicalement notre monde. L'exploration des futurs cas d'application de l'informatique quantique nécessite le partenariat avec un écosystème d'entreprises privées, d'universités et de start-ups et permettra de faire progresser la recherche dans la chimie quantique, la finance, la logistique et la santé. Cela rendra possible la résolution de problèmes complexes dans ces différentes disciplines », explique Olivier Hess, IBM Quantum Hub France Leader & IBM Quantum Ambassador.
L'ordinateur quantique System One d'IBM présenté au CES de Las Vegas 2019 ©IBM
Les milliards de dollars d'investissements d'IBM, Google, Microsoft, Intel, D-Wave et bien d'autres sociétés dans l'informatique quantique témoignent de l'intérêt que suscite cette technologie. L'idée de la création d'un ordinateur quantique a été émise au début des années 1980 par Richard Feynman, Prix Nobel de physique en 1965. À force de bûcher sur des équations quantiques avec des ordinateurs classiques, le grand physicien en a déduit que seul un ordinateur quantique serait à même de réaliser ce type de calculs. « Si vous pensez que vous comprenez la mécanique quantique, c'est que vous ne comprenez pas la mécanique quantique », alertait le génial scientifique à l'époque.
Au lieu de coder des informations sous forme de bits, qui ne peuvent se trouver que dans deux états (0 ou 1) et ne faire qu'un seul calcul à la fois comme un ordinateur traditionnel, l'ordinateur quantique traite des bits quantiques (ou qubits) ayant une infinité d'états qui peuvent se superposer.
En partenariat avec le spécialiste D-Wave, Volkswagen aurait réussi à développer une solution de gestion du trafic ultra optimisée à l'aide d'un ordinateur quantique ©Volkswagen
Suprématie quantique
Concrètement, cela permet de réaliser une multitude de calculs simultanés et de traiter potentiellement des problèmes jusqu'ici impossibles à résoudre avec des ordinateurs classiques dans de nombreux secteurs d'activité : science des matériaux, santé, énergie, climatologie, finance, transport, aérospatiale, etc. La mise au point d'un vaccin pour la COVID-19 ne pourrait prendre potentiellement que quelques semaines, voire quelques jours... Il se dit souvent que l'informatique quantique pourrait également aider à vaincre le cancer, palier le dérèglement climatique, et répondre à la plupart des questions restant aujourd'hui sans réponse.
« Aujourd'hui, c'est l'intelligence artificielle, la blockchain et la cybersécurité qui transforment notre société et son fonctionnement. Demain ce sera la technologie du Quantum Computing (calculateur quantique) », déclarait le Dr Alessandro Curioni, Vice-président Europe et Afrique d'IBM et Directeur du laboratoire de recherche de Zurich.
Est-ce une utopie ? Fin 2019, le magazine Nature a créé l'événement en révélant que les scientifiques de Google avaient réussi pour la première fois de l'histoire à atteindre la suprématie quantique : une étape très importante censée démontrer que l'ordinateur quantique surpasse désormais les capacités de calcul des machines traditionnelles. D'une puissance de 53 qubits, l'ordinateur quantique de Google aurait permis à l'équipe de chercheurs de réaliser en seulement 3 minutes un calcul extrêmement complexe qui aurait nécessité plus de 10 000 ans avec le plus puissant des ordinateurs actuels.
« Nous avons relevé ce défi parce que nous pensons - et le faisons toujours - que l'informatique quantique peut accélérer les solutions à certains des problèmes les plus urgents du monde, du changement climatique à la maladie. » déclarait le patron de Google Sundar Pichai suite à la publication du magazine. Si les scientifiques parviennent un jour à créer des machines pouvant atteindre un volume quantique de 100, 300, voire 500 qbits, on imagine qu'ils seront à même de réaliser des opérations et résoudre des problèmes qui transformeront à coup sûr la société.
L'avènement de la robotique
La pandémie mondiale a non seulement démontré le potentiel incroyable des nouvelles technologies actuelles (services cloud, outils de vidéoconférence, e-commerce, réalité virtuelle...), mais également celui des innovations de rupture les plus futuristes. À commencer par des robots de toutes sortes qui ont plus que jamais prouvé leur utilité depuis le début de la crise.
Redoutablement efficaces et imperméables à la contagion, ces robots basés pour la plupart sur des technologies d'intelligence artificielle sont d'ores et déjà capables de réaliser de véritables prouesses au quotidien que cela soit pour ausculter les malades, patrouiller dans les rues pour faire respecter le confinement, nettoyer les zones infectées, emballer les commandes passées sur Internet, ou encore accueillir et guider les personnes dans les administrations ou les transports en commun.
Les exemples n'ont cessé de se multiplier dans les quatre coins du monde depuis le début de la crise. Des centaines de robots ont été déployés dans les hôpitaux tels que les robots germicides à ultraviolets d'UVD Robots pour désinfecter les chambres et les zones infectées par le Covid-19, les robots androïdes comme le célébrissime Pepper pour distraire les patients ou permettre aux médecins de réaliser des consultations à distance, ou encore des robots humanoïdes comme le génial Cloud Ginger XR-1 de Cloud Minds qui sert à la fois à distribuer des médicaments et de la nourriture aux patients, mais aussi à surveiller leurs signes vitaux sans faire prendre de risques au personnel soignant.
De Wuhan à Madrid, en passant par Tunis ou encore Boston, des robots policiers et agents de sécurité comme Pguard d'Enova Robotics ou Spot de Boston Dynamics patrouillent dans les rues ou à l'entrée des hôpitaux pour contrôler les papiers des passants afin de faire respecter le confinement ou les diriger vers le bon service. Amazon qui exploite massivement les robots dans ses entrepôts pour décharger les palettes et ranger des dizaines de milliers de produits les utilise aussi désormais pour faire livrer des colis à domicile !
Héros bionique de la pandémie, le robot Amazon livre les colis à la porte des clients du e-commerçant dans un quartier de la ville d'Irvine en Californie ©Amazon
Des machines au service de l'humain
Que cela soit dans le centre de Seattle où se trouve le siège social d'Amazon, ou dans la ville pilote d'Irvine en Californie, le dénommé Scout livre les clients directement chez eux sous la supervision encore obligatoire d'un opérateur qui reste à distance. La pandémie actuelle a fait exploser la demande de robots et ce n'est sans doute qu'un début. Selon Idate, le marché de la robotique qui était évalué à 22 milliards d'euros pourrait dépasser les 90 milliards d'euros d'ici 2030. Avec les progrès technologiques attendus dans l'intelligence artificielle, les processeurs, ou encore les réseaux mobiles 5 et 6G, il ne fait déjà plus aucun doute que des robots toujours plus sophistiqués et ressemblants pour certains aux humains vont s'imposer massivement dans la société de demain.
Fabien Raimbault, P.-D.G. de Cyberdroid, l'un des robots humanoïdes de service français les plus avancés, témoigne des capacités que vont acquérir les robots dans les années à venir : « Un robot de service va être non seulement capable de s'adapter et de s'ajuster à son environnement, mais également de détecter la présence des humains et modifier son comportement en conséquence pour effectuer toutes sortes de tâches.»
Certains étant déjà utilisés pour faire du recrutement pour de grands groupes comme Vera de Stafory, il n'est pas impossible que des humanoïdes soient à terme formés pour remplacer des professeurs d'école, des médecins, des agents de sécurité, etc. Ils seront peut-être même considérés comme des citoyens à part entière à l'image de l'humanoïde Sophia d'Hanson Robotics qui a obtenu la citoyenneté saoudienne en 2017. Ce modèle animé par un réseau neuronal possède sa propre personnalité et peut identifier et dialoguer avec ses interlocuteurs en parfaite autonomie... Le champ des possibles avec la robotique dans les 10 à 20 ans à venir semble sans limites.
Le règne des véhicules autonomes
Les véhicules autonomes ou pouvant être pilotés à distance seront devenus la norme dans la société de demain. C'est déjà le cas pour certains moyens de transports en commun comme des métros, des bus ou des véhicules particuliers capables de se rendre d'un point A à un point B en totale autonomie. Des camions autonomes de la société plus.ai notamment ont d'ores et déjà pris du service sur certaines autoroutes américaines, tandis que le développement des voitures particulières sans conducteur prend de plus en plus d'ampleur. Les progrès de la géolocalisation, des réseaux mobiles, de l'intelligence artificielle, des capteurs ou encore des capacités des batteries vont leur permettre de devenir de plus en plus fiables et endurants. À ce stade, il est toutefois difficile de prédire que les voitures autonomes se généraliseront en dehors de certaines zones parfaitement balisées comme des portions d'autoroutes ou des smartcity, par exemple.
Ce n'est peut-être pas sur la route, mais dans le ciel que les véhicules autonomes et en particulier les drones vont se démocratiser dans les 10 prochaines années. L'énorme potentiel des drones n'a pas échappé aux États ainsi qu'aux plus grandes entreprises de la tech comme Google, Amazon ou Facebook qui multiplient les investissements dans ce domaine. Outre les drones militaires de surveillance et de combat, ces robots volants sont utilisés dans de nombreux secteurs d'activité tels que le cinéma, la production télévisuelle, l'agriculture, l'industrie, la topographie, la police, le loisir, etc.
Durant la pandémie, des drones civils du constructeur DJI ont été notamment utilisés par les services de police de Wuhan, de Nice, ou encore de Vienne (Autriche) pour faire respecter le confinement, mais également en Italie pour prendre la température des passants à distance, ou encore au Maroc pour désinfecter des rues, diffuser des messages d'alerte à la population ou encore débusquer des rassemblements interdits de personnes sur les toits-terrasses des immeubles.
Les drones qui ont relevé tout leur potentiel durant la pandémie seront omniprésents dans la société du futur que cela soit pour surveiller, contrôler les passants, transporter des colis ou même des personnes ©DJI
Après des années d'expérimentation, les sociétés Wing de Google et Air's New Delivery Drone d'Amazon sont sur les starting-blocks pour livrer des colis par drone sans contact humain. Avec les progrès technologiques et l'amélioration des batteries (toujours plus légères et endurantes), les drones autonomes capables de transporter des personnes devraient envahir le ciel dans les deux prochaines décennies. Des constructeurs tels que Bell, Ehang, Airbus Helicopters ou encore Volocopter ont déjà fait voler leurs premiers passagers lors de tests couronnés de succès. Uber veut révolutionner ce mode de transport et ambitionne de faire voler des drones Nexus développés par son partenaire Bell d'ici 2023.
Opéré pour le moment à distance, l'engin peut voler sur une distance d'environ 90 km jusqu'à 600 mètres du sol et à plus de 230 km/h. Airbus Helicopters qui a développé un aéronef très ressemblant baptisé CityAirbus prévoit de transporter des passagers à l'occasion des JO de Paris en 2024. Autant dire que dans une vingtaine d'années, les drones auront peut-être complètement ringardisé les véhicules terrestres. Ce n'est sans doute que quelques exemples des bouleversements technologiques qui nous attendent dans la société de demain.
Une société futuriste low-tech
La pandémie a remis en cause de nombreuses certitudes sur les bien-fondés de l'hyper mondialisation et de la toute-puissance technologique. Pour les adeptes du low-tech, la société de demain doit se réinventer en diminuant drastiquement sa dépendance à la haute technologie. Né dans les années 70, ce mouvement se compose de différents courants de pensée, dont certains estiment que les technologies sophistiquées ne peuvent pas être une solution d'avenir, car elles ne sont pas pérennes et elles creusent les inégalités sociales et économiques.
De l'épuisement des énergies fossiles, à la surconsommation d'énergie, en passant par l'exploitation effrénée de matériaux polluants et rares ou encore les déchets difficiles à traiter et l'obsolescence programmée, les low-techs ne manquent pas d'arguments pour dénoncer les conséquences parfois désastreuses de la course à la haute technologie. Par opposition à la high-tech, le low-tech (basse technologie) privilégie l'usage de technologies et de méthodes plus simples et moins onéreuses pour subvenir à nos besoins essentiels.
Véritable bible du mouvement, le blog Low-Tech Magazine édité depuis 2007 à Barcelone par Kris De Decker constitue une source d'informations inépuisable sur le sujet. Respect de l'environnement oblige, le blog est également disponible sur un serveur alimenté par de l'énergie solaire ainsi que dans une version papier imprimée depuis 2019.
Un appel à la sobriété
Respectueuses de l'environnement et durables, les solutions low-tech font appel à l'ingéniosité de l'homme et sont idéalement conçues localement, avec des matériaux naturels ou recyclés. Elles doivent également être accessibles à tous aussi bien techniquement qu'économiquement et facilement réparables. Contrairement aux technologies high-tech dont la complexité technique et le coût de développement nécessitent des personnes hautement qualifiées et d'importants moyens financiers, les solutions low-tech doivent pouvoir être conçues, partagées, et utilisées par le plus grand nombre.
Clément Chabot, cofondateur du Low-Tech Lab (un programme de recherche collaboratif visant à promouvoir les low-technologies) donne sa vision du mouvement : « Le gros sujet de la démarche low-tech, car on parle plus d'une démarche que d'une solution technique et matérielle, c'est de questionner l'usage et le comportement. Est-ce que l'on a vraiment besoin de vidéos 4K pour voir des chatons roulés sur le parquet, ou que tout soit toujours connecté ? L'idée n'est surtout pas de revenir au temps d'avant, mais de continuer à bénéficier de l'intérêt des nouvelles technologies en ayant une utilisation raisonnée sans polluer dans tous les sens. Les voitures électriques ont par exemple le vent en poupe, mais ce sont juste des voitures plus lourdes avec plus de matériaux rares et qui nécessitent quand même de produire de l'énergie.»
«Même si on ne consomme pas à l'endroit où on va les utiliser, la consommation d'énergie est bien réelle ailleurs et même plus importante qu'avec des véhicules classiques. On délocalise juste notre pollution ! L'erreur est de ne pas se questionner sur l'usage et la place de la voiture individuelle dans notre société. Sachant qu'un trajet sur deux en France fait moins de 7 km, est-ce que l'on a vraiment besoin d'une voiture à soi pour les faire où est-ce que l'on peut se déplacer autrement ? Il y a surement aussi des leviers politiques à mettre en place sur ces sujets qui seront très incitatifs pour adopter une démarche de sobriété matérielle ».
Au-delà des innovations techniques et écologiques, le low-tech prône le développement d'un modèle socio-économique plus modéré, plus juste et équitable. Des valeurs partagées également par les fameux Makers du mouvement Do It Yourself (Faites le vous-même) qui a pris une ampleur considérable ces dernières années notamment en France à travers l'événement Maker Faire qui se déroule à la Cité des sciences de Paris depuis 2017.
Fervent adepte de ce mouvement, le journaliste, auteur à succès et entrepreneur visionnaire américain Chris Anderson lui a consacré un ouvrage intitulé « Makers : La nouvelle révolution industrielle » dans lequel il évoque son évolution dans les années à venir : « Dans les 10 dernières années, on a cherché de nouvelles manières de créer, d'inventer et de travailler ensemble sur le web. Dans les 10 prochaines années, on appliquera ces leçons au monde réel.»
Les solutions low-tech qui ont germé durant la crise du Covid-19
Même si les technologies ont joué un rôle indispensable durant la crise du Covid-19, la philosophie du low-tech a rencontré un énorme regain d'intérêt. Certaines idées du courant qui appellent de leurs vœux l'ingéniosité de l'homme pour trouver des solutions techniques simples, durables et locales se sont généralisées que cela soit pour fabriquer localement et avec les moyens du bord des masques, des visières, des blouses de protection, du gel hydroalcoolique, ou encore des respirateurs artificiels. Des initiatives largement diffusées par le magazine Make qui regroupe des communautés de Makers du monde entier.
Citons également les agriculteurs et autres producteurs locaux qui se sont mobilisés et regroupés pour faire de la vente directe aux particuliers durant la pandémie en se passant des habituels intermédiaires. Ce ne sont que quelques exemples des initiatives qui ont été mises en place durant la crise, mais leur succès a largement démontré qu'il est possible de bâtir une société et une économie plus durable et recentrée sur l'humain.
Durant la pandémie du Covid-19, des entreprises et des particuliers comme la ont entrepris une démarche parfois à la frontière entre le high et low-tech pour concevoir par exemple des visières à l'aide du système D et d'imprimantes 3D ©Heliox Lab
Réinventer la société de demain
Qu'il s'agisse de technologies, de services ou de savoir-faire, les alternatives low-tech pourraient bien se multiplier dans les années à venir. Pour réduire la consommation effrénée de nouveaux terminaux mobiles, l'une des initiatives low-tech les plus emblématiques créées ces dernières années est le fameux Fairphone. Conçu avec des matériaux recyclés et recyclables, ce téléphone entièrement modulable et réparable prouve qu'il est possible de proposer demain des solutions technologiques plus vertueuses sans pour autant renoncer à la qualité de services.
Bien qu'il ne soit pas issu du courant low-tech, le système d'exploitation Linux développé par Linus Torvald a été conçu de telle manière qu'il peut être utilisé gratuitement de longues années sur des ordinateurs qui seraient obsolètes avec d'autres systèmes. Le succès de Linux ne se dément pas et on le retrouve désormais partout dans les objets connectés, les voitures, la robotique, les serveurs informatiques, les machines industrielles, etc. Si les innovations low-tech peuvent parfois paraître archaïques, certaines constituent de véritables chefs-d'oeuvre de créativité.
C'est le cas de l'ingénieuse GravityLamp qui est une lampe LED rechargeable capable de produire de la lumière grâce à la force de la... gravité ! Inventée par les deux designers Martin Riddiford et Jim Reeves, la GravityLight fonctionne grâce au principe de la dynamo : une bobine qui tourne à proximité d'un aimant pour générer de l'électricité comme on en trouve sur les vélos. La lampe LED qui doit être positionnée en hauteur se compose d'une dynamo, d'une poulie, d'une courroie, et d'un sac de 12 kg (lestée de terre, de pierre ou autres) accroché à cette dernière. Attiré par la gravité, le sac descend tout doucement pendant une trentaine de minutes en faisant tourner la courroie qui alimente la dynamo et active la LED durant tout ce temps.
Une fois terminé, il suffit de quelques secondes pour remonter le sac et recommencer l'opération. Cette innovation pour le moins impressionnante permet de bénéficier d'une énergie illimitée sans aucun consommable. Financée avec succès via la plateforme de crowfunding Indiegogo, la GravityLight a depuis largement fait ses preuves que cela soit dans des pays en développement, des zones reculées ou dévastées par des incidents climatiques et qui n'ont plus accès à des sources d'énergie.
Déconnexion numérique
Des innovations low-tech comme le four solaire pour faire chauffer de l'eau ou cuisiner, une éolienne autoconstruite en bois permettant de produire de l'électricité, le réfrigérateur autoréfrigéré à enfouir dans le sol et bien d'autres démontrent que la dépendance aux technologies sophistiquées n'est pas une fatalité. En pleine crise du Covid-19, le mouvement nous invite à imaginer un avenir radicalement différent où les technologies ne prédominent pas tout le reste. Dans le même temps, de plus en plus de personnes plaident pour la déconnexion numérique, limiter le temps d'écran et abandonner les réseaux sociaux. Malgré ses 2,3 milliards d'utilisateurs, dont 35 millions en France, Facebook est loin de faire l'unanimité et compte chaque jour un peu plus de réfractaires.
Une étude de Pew Research Center a révélé que le service de Mark Zuckerberg a perdu pas moins de 20 % de jeunes Américains de 13 à 17 ans entre 2015 et 2018 et le déclin se poursuit un peu partout dans le monde. L'OMS ou des organisations comme PAUSE (Québec) ou la start-up française 4teens ne cessent de tirer la sonnette d'alarme pour que les enfants comme les adultes limitent leur temps d'écran pour bouger, profiter des uns et des autres et améliorer leur bien-être et leur santé. Des conseils mais aussi des solutions (à l'instar de l'application de gestion de l'addiction aux écrans de 4teens) qui font particulièrement sens après cette période inédite de confinement.
Et vous, comment imaginez-vous la société de demain ? Pensez-vous qu'il sera possible de vivre un jour avec moins de technologies, ou que les technologies seront au contraire toutes puissantes et inexorablement liées au futur de l'humanité ?