Selon le rapport du Shift project et de Supaéro décarbo, le secteur aérien doit aussi réduire sa croissance et anticiper les parcours de reconversion professionnelle.
Selon le rapport du Shift project et de Supaéro décarbo, le secteur aérien doit aussi réduire sa croissance et anticiper les parcours de reconversion professionnelle. | OUEST-FRANCE
« On veut sortir du pour/contre et apaiser le débat sur l’évolution nécessaire de l’aviation dans un contexte de réchauffement climatique », insistent Grégoire Carpentier et Olivier Del Bucchia. Le secteur emploie 435 000 personnes en France, dont 140 000 dans l’Ouest rien que pour l’industrie (Airbus à Saint-Nazaire et Nantes, notamment).
Pendant neuf mois, ces deux ingénieurs aéro, membres du think tank « Shift project » et co-fondateurs de SupAéro décarbo, ont piloté un gros travail de chiffrage de la décarbonation du transport aérien. Leur rapport « Quelle aviation dans un monde contraint ? » s’adresse aux grands acteurs de l’aviation : industriels, compagnies, pouvoirs publics… « Les conclusions ne les arrangent pas, mais beaucoup reconnaissent la qualité de ce travail », confie Grégoire Carpentier.
Deux scénarios chiffrés
À partir des travaux du Giec, un organisme scientifique international, les experts ont établi, pour le secteur aérien, « un budget d’émission de carbone compatible avec un monde vivable en 2100 ». L’actuel objectif est de réduire de 50 % les émissions d’ici à 2050 (par rapport à 2005). Le rapport est plus précis : 21,6 mégatonnes maxi rejetées, pour la France, entre 2018 et 2050.
Deux scénarios chiffrés sont sur la table pour y parvenir. Le premier, « très optimiste », prévoit le renouvellement de tous les avions anciens en quinze ans (contre vingt-cinq ans aujourd’hui), complété par « une production de carburants alternatifs au-delà de toutes les projections actuelles, avec une priorité donnée au transport aérien ». On peut ajouter une meilleure densification des cabines, la suppression des vols de moins de 4 h 30 remplaçables par du ferroviaire et la limitation de l’aviation d’affaires. Le second scénario donne cinq ans de plus à cette mutation.
« Nos travaux montrent qu’aucune trajectoire réaliste ne peut conduire à l’objectif sans réduire, aussi, la croissance actuelle de 4 % du trafic, observent les chefs de projets. Respecter le budget carbone nécessite de conjuguer deux leviers : le progrès des technologies décarbonantes et l’ajustement du trafic aérien au rythme de leurs déploiements. »
Le rapportcomplet de 234 pages est accessible en ligne pour le grand public. On y trouve aussi sa « boîte noire », c’est-à-dire les différentes feuilles de calcul.