Acheter une voiture à Singapour coûte les yeux de la tête. Ce n’est pas d’aujourd’hui, mais ça n’a jamais été aussi vrai, rapporte Bloomberg, qui livre le prix actuel du Certificate of Entitlement (COE), l’indispensable permis dont le coût s’ajoute à celui du véhicule et aux autres taxes prélevées par la cité-État, pour la “catégorie supérieure” : comptez un peu plus de 110 500 dollars singapouriens, soit 77 500 euros. À ce niveau, le prix d’achat TTC d’une Toyota Corolla, par exemple, l’un des véhicules les plus vendus au monde, se trouve au final pratiquement multiplié par cinq.
Si l’on ajoute les taux d’intérêt élevés qui s’appliquent sur les prêts automobiles, le prix du carburant et le coût des frais d’entretien, acheter une nouvelle voiture devint “une décision financièrement aberrante”, regrette une résidente interrogée par Bloomberg. “C’est le prix d’un appartement acheté auprès du Housing & Development Board [HDB, l’organisme gouvernemental chargé des logements sociaux]. Pourquoi dépenser autant d’argent pour un actif qui se déprécie très vite ?”
Les autos les plus chères du monde
Le prix des permis – dont le nombre est strictement limité – étant fonction du marché, “les prix actuels élevés sont le résultat naturel de la forte demande qui se maintient depuis le second semestre 2020”, explique la Land Transport Authority de Singapour. Et acheter une voiture d’occasion n’est même pas une option, précise Bloomberg, car les vendeurs ont augmenté leurs prix pour suivre l’évolution de ceux des véhicules neufs.
Les automobiles qui circulent à Singapour sont donc les plus chères du monde. Cette politique n’est pas sans risques, note Bloomberg car la flambée des prix peut fortement réduire l’attractivité de la ville auprès des talents internationaux alors que la cité-État figure déjà au deuxième rang des villes les plus chères du monde pour les expatriés, juste après Hong Kong, selon la dernière enquête de Mercer sur le coût de la vie. D’autant que les effets de l’inflation mondiale se font ressentir aussi à Singapour, notamment sur les loyers des logements privés, qui ont grimpé en flèche, et sur l’alimentation.
Mais le modèle de Singapour qui consiste à limiter le trafic en faisant de l’automobile un luxe, contrebalancé par les milliards dépensés pour un système de transports publics efficace, “commence à paraître moins fou alors qu’ailleurs dans le monde d’autres villes tentent de concevoir des infrastructures plus durables”, souligne Bloomberg.
“Ici, vous n’avez pas besoin d’une voiture”
“Les urbanistes sont attentifs à ce qui se passe à Singapour, explique Song Seng Wun, économiste chez CIMB Private Banking. Vous ne pouvez pas construire davantage de routes sans prendre de l’espace et des ressources aux autres.” Et de fait, Singapour est “l’une des seules grandes villes au monde qui réussisse à réduire son parc automobile”.
La plupart des Singapouriens se contentent des transports en commun, prennent des taxis ou ont recours aux services de covoiturage. “À Singapour, vous n’avez pas besoin de posséder une auto, constate Walter Theseira, professeur à l’Université des sciences sociales de Singapour. Une croissance effrénée du parc de véhicules entraînerait des embouteillages insupportables.”
La ville compte d’ailleurs encore étoffer le parc des bus et des trains en circulation. À terme, 80 % des ménages devraient être à moins de dix minutes à pied d’une station de métro ou de bus. Au total, le gouvernement prévoit d’investir plus de 60 milliards de dollars singapouriens dans le réseau ferroviaire d’ici 2030.
En 2019, juste avant la pandémie, Singapour (qui rassemble 5 millions de résidents sur une île dont la surface représente à peu près la moitié de l’agglomération londonienne), était classé 96e sur les 416 villes répertoriées par le Traffic Index de TomTom, qui offre un aperçu de la circulation automobile dans les principales zones urbaines du monde, rappelle Blooomberg.
Courrier Expat (Paris)
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