Une photo fournie par le palais royal saoudien le 10 janvier 2021 montre le prince héritier saoudien Mohammed bin Salman lançant "The Line", une ville verte pouvant accueillir environ un million de personnes, à NEOM, une zone du nord-ouest du royaume en cours de développement. ©AFP or licensors
Alors que la Coupe du monde au Qatar peine à camoufler le nombre de personnes décédées sur son chantier ainsi que les conséquences désastreuses que le projet a sur l’environnement, une autre construction est déjà vivement critiquée. D’abord moquée pour son délire architectural, ses taxis volants et robots domestiques, la nouvelle ville futuriste saoudienne "The Line" désignée pour accueillir les Jeux asiatiques d’hiver de 2029 suscite de nombreuses inquiétudes.
"Aucune route, aucune voiture, aucune émission, The Line utilisera des énergies 100 % renouvelables et 95 % des terres seront préservées pour la nature", annonce le site officiel saoudien. "The Line" est née de la vision du prince héritier Mohammed Ben Salmane ainsi que d’un budget estimé à 500 milliards de dollars.
Deux gratte-ciel parallèles recouverts de miroirs de 500 mètres de hauteur et de 170 kilomètres de longueur sur une surface de 34 kilomètres carrés. Voici les grandes lignes du plan architectural. Vanté pour sa capacité à héberger l’équivalent de la population de New York et pour son objectif environnemental de neutralité carbone, le projet pose déjà de nombreuses questions tant d’un point de vue social qu’écologique.
Des images prises par un drone de la société OT Sky ont permis de confirmer le début du chantier dont la première phase des travaux est prévue pour 2030. Bien que les images de camions faisant des allers-retours avec des mètres cubes de terre et de gravats en plein désert laissent déjà présager des dégâts environnementaux, ce sont les déplacements forcés qui sont surtout dénoncés pour le moment dans les médias. Selon Numerama, 20.000 membres de la tribu des Howeitat auraient déjà été forcés de quitter le territoire où les travaux ont lieu alors que la tribu y est présente depuis des siècles.
Des condamnations à mort pour les opposants
Depuis le lancement du projet, des condamnations à mort ont déjà été prononcées par des tribunaux d’exception saoudiens à l’égard des résidents qui refusaient d’obéir à l’ordre d’expulsion.
“Le tribunal pénal spécialisé (CPS) d’Arabie saoudite a condamné à mort trois membres de la tribu Huwaitat dont la famille, ainsi que d’autres, ont été expulsées de force et déplacées pour faire place au mégaprojet Neom poursuivi par les autorités saoudiennes”, peut-on lire dans le communiqué de presse d’ALQST, une organisation de défense des droits humains en Arabie saoudite. Ataullah al-Howeiti est l’une de ces trois personnes. Il était le frère d’Abdul Rahim al-Huwaiti, un militant qui a été neutralisé en 2020 par les forces de l’ordre saoudiennes, après qu’il se soit vivement opposé à la construction de la nouvelle ville. “Je serai tué et ils m’accuseront d’être un terroriste parce que j’ai refusé d’être déplacé et de quitter mon domicile”, avait-t-il déclaré.
Arabie saoudite : Abdou Rahim Al Howaiti s'est opposé à l'expropriation pour la construction du projet à Neom de MBS.Il a été abattu par les forces de l’ordre quelques jours plus tard, estampillé de l'étiquette "terroriste"Vidéo complète 📹➡️ https://t.co/MvzsrabtUM pic.twitter.com/PkP9SmmGgy
Selon le média Middle East Eye, l’expulsion des Howeitat s’est renforcée depuis décembre 2021. "Parmi les nouvelles mesures figurent les coupures d’eau et d’électricité et le survol par des drones de surveillance", annonce-t-il.
Des cadres occidentaux pour coordonner les travaux
Selon le Wall Street Journal, l’Arabie saoudite proposerait à des cadres dirigeants occidentaux de venir coordonner les travaux de construction moyennant un million de dollars par an. Cette proposition est particulièrement attirante pour les expatriés occidentaux étant donné que le royaume ne leur prend aucun impôt sur ce salaire. Parmi la vingtaine de "dirigeants seniors", on ne trouve presque pas de Saoudiens mais des Occidentaux comme Peter Terium, ex-cadre de RWE, Joseph Bradley, ancien de Cisco, Dirk Van Schependom, précédemment au cabinet d’audit KPMG UK, et Tim Shorrocks, ancien d’Amazon.