« France nation verte ». L’intitulé de l’outil de planification écologique dévoilé, vendredi 21 octobre, par la première ministre, Elisabeth Borne, annonce la couleur. Reste à inventer le modèle de société qui va avec.
Pour atteindre l’objectif de sortie des énergies fossiles, de réduction de 55 % de nos émissions de gaz à effet de serre dès 2030 et de neutralité carbone en 2050, le gouvernement appelle à une mobilisation générale qui doit se décliner à travers vingt-deux chantiers, allant du transport au logement en passant par la façon de produire, de consommer, mais aussi par la préservation de la biodiversité et des écosystèmes. Etat, collectivités locales, entreprises et ménages, tous doivent apporter leur contribution et faire converger leurs efforts.
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Emmanuel Macron avait promis lors de sa campagne pour l’élection présidentielle de faire de la transition écologique le fil rouge de son quinquennat, l’alpha et l’oméga des politiques publiques, le chantier dont tous les autres dépendraient. Plutôt qu’une « mesure magique », susceptible de régler tous les problèmes, le gouvernement propose un grand plan d’ensemble, coordonné entre les différents ministères, pour que toutes les décisions soient cohérentes. Chaque aspect du déploiement, qu’il s’agisse des financements, des mesures d’accompagnement pour une « transition juste », des impacts sur l’emploi, sur la formation ou sur l’aménagement du territoire, doit découler de la même logique pour aboutir à une transition qui est sur toutes les lèvres, mais qui, jusqu’à présent, avance à pas comptés, sans vision d’ensemble.
Un modèle de société flou
Les premières mesures en faveur de la lutte contre les passoires thermiques ou de la promotion du véhicule électrique montrent qu’il ne suffit pas de bonnes intentions pour changer les comportements, mais qu’elles doivent faire l’objet d’une anticipation et d’une programmation afin que les décisions s’ancrent dans le réel. De ce point de vue, la planification écologique est l’outil adéquat.
Les objectifs de « France nation verte » sont clairs et partagés désormais par une majorité de Français. La méthode pour y parvenir en recourant à une approche systémique, servie par des instruments de pilotage, capables de fournir des évaluations régulières, peut être à la hauteur des enjeux. Mais il manque encore au dispositif un maillon essentiel : dans quel modèle de société doit s’inscrire cette transition écologique ?
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A ce stade, celui-ci reste flou. Le gouvernement parle de « vivre mieux », sans préciser ce que cette amélioration recouvre concrètement. Les efforts, les changements de mentalité, les renoncements que cette bascule historique implique sont tels qu’ils nécessitent de tracer une nouvelle ligne d’horizon, donnant à chacun l’envie de se dépasser au service d’un enjeu collectif.
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Le cadre actuel, fondé sur la poursuite d’une croissance aveugle et une notion de progrès matériel obsolète, ne permettra pas de porter l’ambition d’une véritable transition écologique. Celle-ci ne constitue pas simplement un cap difficile à passer. Elle requiert de nouvelles logiques intellectuelles, économiques et sociétales, qui restent à définir.
Elisabeth Borne appelle à la « mobilisation de tous ». Mais, pour entraîner tous les rouages de décision sur le terrain, pour garantir à chaque citoyen une part d’effort juste et équitable selon ses moyens, pour emmener les Français dans ce projet, tout en évitant un mouvement type « gilets jaunes », il est indispensable de leur proposer un récit et une vision. L’intervention télévisée du président de la République, mercredi 26 octobre, serait une bonne occasion de nous en dire plus sur l’un comme sur l’autre.
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